Les moteurs de recherche sont devenus un outil indispensable dans notre vie. Nous sommes arrivés à un point où nous tenons pour acquis que presque tout peut être recherché sur Google. Notre dépendance leur a même conféré une influence disproportionnée sur le comportement en ligne, la consommation de contenu et la culture. Et ce n'est probablement pas près de changer car avec l'essor de ChatGPT, une nouvelle technologie agitatrice a fait son apparition : L'IA générative.
Qu'est-ce que l'IA générative ?
Comme son nom l'indique, l'IA générative est un type d'intelligence artificielle qui utilise l'apprentissage automatique pour générer de nouveaux contenus. Contrairement aux autres types d'IA, qui sont formés sur des ensembles de données existants (datasets) et utilisent des méthodes statistiques pour faire des prédictions, les modèles d'IA générative peuvent créer un contenu entièrement nouveau en apprenant les modèles et les structures présents dans les données. Plus concrètement, ils sont capables de générer des algorithmes, des textes, des images, voire de la musique et de la vidéo.
Cette technologie a un potentiel d’application très large: le design, le divertissement, l'éducation, les soins de santé et la médecine. Mais en se tenant au domaine de la recherche en ligne, voici comment les choses pourraient évoluer pour les moteurs de recherche, les annonceurs ou les créateurs de contenu.
Comment l'IA générative pourrait-elle influencer la recherche ?
Les revenus publicitaires des éditeurs diminuent depuis plusieurs années. Par exemple, Google a réduit les revenus des sites web en fournissant des résultats instantanés, étant donné qu’ils permettent aux utilisateurs de trouver l'information dont ils ont besoin sans cliquer sur un site web. En 2019, près de la moitié des recherches ont été résolues sans aucun clic, réduisant ainsi les revenus publicitaires pour et par ces sites partenaires.
Récemment, Microsoft a fait l'acquisition du développeur de ChatGPT OpenAI. Leur intention ? Révolutionner son moteur de recherche vers ce qu'ils appellent "Le nouveau Bing". Ils ont l'intention de récupérer une part importante des 93 % de parts de marché de Google en intégrant l’IA générative à leur moteur de recherche en premier..
La publicité représentant plus de 80 % des revenus de Google, il est peu probable que l'entreprise tolère une baisse de ses revenus. Bien qu'il n'y ait pas d'informations concluantes sur la manière dont la recherche payante sera affectée, il est raisonnable de supposer que Google améliorera ses modèles de revenus pour inclure des publicités dans les résultats de recherche générés par l'IA.
Cette évolution pourrait être dangereuse, car dès que les sociétés de moteurs de recherche commenceront à planifier la génération de revenus en recevant des paiements pour promouvoir le contenu de certains sites web ou éditeurs, les résultats de recherche gratuits et équitables sur le web seront affectés et la recherche en ligne deviendra biaisée.
Actuellement, les annonceurs paient pour des mots-clés afin que leurs annonces apparaissent lorsque ces mots sont utilisés dans des recherches. Ce modèle est sous pression, car avec l'IA générative, les requêtes exactes deviendront de plus en plus importantes. Les annonceurs pourraient être amenés à enchérir sur des phrases spécifiques plutôt que sur des mots-clés génériques, ce qui entraînerait une concurrence plus intense qu'auparavant. Les annonceurs pourraient alors placer des annonces directement dans les réponses générées.
Sur le plan créatif, l'IA générative pourrait être utilisée dans les campagnes de marketing pour créer des publicités personnalisées adaptées spécifiquement aux besoins de chaque utilisateur, sans nécessiter d'intervention manuelle de la part des spécialistes du marketing eux-mêmes ; elle pourrait même générer un contenu attrayant en créant, par exemple, une publicité vidéo à partir d'une entrée de texte brut. Dans un avenir pas trop lointain, elle pourrait probablement aussi améliorer l'expérience des spécialistes du marketing dans leur processus de création de campagnes, de la même manière que Google Workspace sera bientôt enrichi de nouvelles fonctionnalités d’intelligence artificielle.
Quels changements dans un avenir proche?
Un point crucial est que dans sa forme actuelle, ChatGPT, qui n'est qu'un exemple des outils d'IA générative, n'est pas un moteur de recherche car il n'a pas accès aux informations en temps réel comme le fait un moteur de recherche sur le web. Il n'a été formé qu'à partir d'un immense dataset qui ne dépasse pas octobre 2021. Il n'a par exemple aucune idée de ce qui se passe en Ukraine à l'heure actuelle. Le former à la même vitesse que l'information est extrêmement difficile en termes de puissance et représenterait un coût financier colossal. Cela soulève également une autre grande question : Que vont-ils apprendre et de qui ? Un outil d'IA générative doit être entraîné sur des dataset soigneusement sélectionné afin d'éviter de générer du contenu biaisé, parce qu’il sera responsable de son propre contenu, contrairement aux moteurs de recherche qui ne sont que des guides vers des sources de contenu.
Alors que Google est le collègue qui nous propose un livre dans une bibliothèque qui peut répondre à notre question, ChatGPT est le collègue qui a déjà lu tous les livres de la bibliothèque et qui peut répondre à notre question. - Harvard Business Review
Malgré le battage médiatique autour de l'IA générative, il reste d'importants défis techniques, juridiques et financiers à relever avant que ces outils puissent atteindre l'échelle, la robustesse et la fiabilité d'un moteur de recherche établi tel que Google. Cependant, le web tel que nous le connaissons va définitivement changer et les annonceurs et les créateurs de contenu devront s'adapter à ce changement majeur afin de pouvoir bénéficier de sa puissance.
Eloi Baudelle
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